19 septembre 2010

René, Gabrielle et Marcel

C’est avec un peu de déception que j’ai récemment découvert que le Numéro Spécial consacré à l’Exposition de la “Section d’Or” (n°1 et seul paru, 9 octobre 1912),

était loin de proposer autant d’articles que de collaborateurs annoncés en première page. J’attendais en effet un article de René Blum (ici annoncé comme “collaborateur” car auteur de la préface du catalogue de l’exposition du même nom) et ce fut sans. En revanche, faisant rétrospectivement écho à son article intitulé « Musique d’aujourd’hui » paru dans Les Soirées de Paris en mars 1914,

Francis Picabia et Gabrielle Buffet circa 1910

l’article de Gabrièle Buffet intitulé « Impressionnisme musical » fut une bonne surprise. Il faudrait, idéalement, le commenter et déterminer sa place dans l’histoire de la critique musicale… Comme pour les autres documents mis en ligne sur le blog de L’Œil cacodylate, je livre ici ces deux articles à l’état d’archive, ainsi que la préface de René Blum au catalogue de la Section d’Or.

Une fois encore, c’est à la bibliothèque Kandinsky que j’ai pu consulter une des rares plaquettes publiées par Pierre André Benoît. Publié sans titre, « imprimé 36 fois à Alès par PAB le 1er octobre 1969 », cet hommage à Marcel Duchamp, paru un an après la disparition de ce dernier, comporte quatre textes (Man Ray, Gabrielle Buffet, Pierre de Massot et Robert Lebel), un collage de l’éditeur et une gravure en fin de volume non mentionnée mais sans doute réalisée par Alexandre Calder – auquel on doit également la gravure ornant la couverture de cet opuscule et composée uniquement des lettres du prénom de l’inventeur du ready-made. La légende de la gravure est la suivante :

M. Duchamp

Born like a light

Lived like a light

Out like a light

And that was the delightful life

of Marcel Duchamp

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Impressionnisme musical

La musique traverse actuellement une période assez semblable à ce qu'a été au dernier siècle l'impressionnisme pour la peinture.

C'est au nom des lois naturelles de la vibration sonore qu'elle s'échappe de la scholastique et de la rhétorique musicale, et réagit contre l'arbitraire ides codes d'harmonie et des lois de composition.

Ainsi en peinture les lois de la vibration lumineuse ont été Je point de départ des théories impressionnistes ; et dans les deux cas ces théories aboutissent plus à une recherche, de réalité objective qu'à un effort de création.

Les impressionnistes et néo-impressionnistes ont tenté de donner sur une toile l'illusion de l'atmosphère, de la lumière vibrante, par l'emploi des complémentaires et la division des tons.

Très semblable à ce système est l'adjonction à l'accord parfait des harmoniques éloignées de la fondamentale, accord qu'on trouve abondamment dans toutes les œuvres modernes et qui donne l'illusion des sons en mouvement dans l'atmosphère. La tonalité s'affirme non plus, par les rapports simples de tierce et de quinte, mais par un subtil amalgame de toutes les subdivisions du son fondamental, dont notre oreille suit à peine la logique tonale.

L'idée musicale n'est plus un discours abstrait, mesuré, coupé de périodes bien définies ; une ligne dont on suit le dessin précis, mais une suite d'embryons de lignes dépendantes du travail harmonique, et que l'on discerne peu dans l'ensemble des subtiles combinaisons et des dissonances. L'impression esthétique que nous en avons, est moins le résultat de la logique suivie de l'idée, que le plaisir tout sensoriel de cet enchevêtrement de vibrations sonores : moins une « ordonnance » que la recherche d'harmonies rares, dont la valeur d'expression ne dépend point d'une idée mélodique directrice, mais de leurs rapports réciproques, de leur relativité.

En résumé, nous constatons un enrichissement prodigieux de la « matière » musicale, l'épanouissement de toutes les ressources naturelles de la musique, mais... la musique elle-même a-t-elle profité de ces nouvelles richesses ?

Nous nous en rapportons aux œuvres pour nous faire une opinion sur ce sujet, et sommes amenés à constater la faiblesse générale, à quelques exceptions près, des productions résultant de ces tendances; leur inconsistance, leur manque de profondeur, qui, d'ailleurs, nous apparaît nettement aussi dans les recherches impressionnistes de la peinture.

La preuve en est aussi dans l'impossibilité de la musique actuelle à vivre d'elle-même, sans un canevas littéraire quelconque. Au contraire de la peinture actuelle qui tend vers une liberté d'expression de plus en plus grande, la musique, malgré la richesse nouvelle de son « matériel », ne se suffit plus à elle-même, et les œuvres pour exister doivent s'étayer sur un programme dont elles prétendent faire la description exacte.

La musique devient ainsi une sorte d'imagerie sonore. Comment ne point comprendre la puérilité de cette recherche, et que plaquer des harmonies si nouvelles, si subtiles soient-elles, sur une carcasse littéraire, sans architecture propre, n'est point faire de la musique ?...

Comment ne point conclure (forts aussi de l'exemple que nous a donné l'impressionnisme en peinture), à l'impossibilité d'un grand essor de la musique actuelle.

Et alors que nous importe d'être sortis des codes harmoniques, des formules, des moules anciens, si ce n'est que pour arriver à un asservissement plus grand de la musique elle-même, à d'autres procédés, qui risquent d'entraver, plus encore son développement ?

Gabrielle Buffet in Numéro Spécial consacré à l’Exposition de la “Section d’Or”, 9 octobre 1912. N° 1 et seul paru.

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Musique d’aujourd’hui

Les tendances actuelles de la musique nous paraissent très indécises et contradictoires.

L'école de Franck, rigoureusement scholastique, a par sa vigueur même provoqué une poussée violente dans un art plus libre et plus sensoriel, basé sur la recherche des sonorités, des harmonies, des rythmes pour eux-mêmes et non plus sur la logique d'un code musical conventionnel.

Ce fut l'envahissement de tous les domaines défendus : suppression des frontières arbitraires de la consonance et de la dissonance, des lois de tonalité et d'architecture ; transformation de la phrase mélodique à périodes régulières assujetties à un syllogisme tonal en phrase harmonique libre, sans autre limite que la forme de ses rythmes.

L'épanouissement de toutes les ressources de l'orchestre, l'orgie de combinaisons inconnues de sons et de sonorités ; enfin, un considérable enrichissement de toute la « matière » musicale.

Il est curieux de constater, et c'est là la contradiction dont nous avons parlé, que malgré cette vigoureuse réaction, l'œuvre musicale de notre époque, reste sans grande puissance ni originalité.

Ou c'est l'adaptation de musiques anciennes et surtout étrangères A de nouvelles habitudes sonores; ou c'est une recherche de sonorités précieuses et imprévues, mais vides de pensée, dont l'oreille et l'esprit se lassent sitôt l'accoutumance venue.

Le fait d'avoir rejeté les vieilles formes n'a pas suffi à déclencher une évolution précise. Elle est restée superficielle : une évolution de métier. L'esprit musical a été troublé sans être renouvelé. L'inspiration moderne n'a point la force de se défricher line nouvelle route, elle reste timide et indécise et est, malgré tout, un compromis entre les anciennes traditions et les libertés nouvelles.

Sans doute, est-il des époques où tel art correspond mieux qu'un autre aux besoins existants.

Il ne nous semble pas, malgré ln vulgarisation générale de la musique, l'engouement et certes la plus réelle compréhension qu'on eût de cet art, que nous soyons dans une période qu'on ait de cet art, que nous soyons d'ans une période musicale.

Les œuvres ultra-modernes nous en sont une preuve. Plus d'essais de musique pure, mais des formes mi-dramatiques, mi-musicales, c'est-à-dire que l'architecture idéale des formes anciennes, sonates, symphonies, etc., etc., est remplacée par un motif littéraire auquel la musique s'assujettit rigoureusement et qui est la carcasse même de l'œuvre : développement à outrance du poème symphonique, de la musique à programme, avec programme de plus en plus précis, musique de scène, musique de danses, tableaux symphoniques et enfin, le « tout dernier genre », celui des pièces descriptives où l'on peut constater l'absorption de l'élément musical par l'élément littéraire.

Nous donnerons, pour plus de clarté, un exemple du genre en question.

Il s'agit d'une petite pièce pour piano intitulée, je crois : La Bavarde, parfaitement comique, mais qui dans sa cocasserie caractérise bien des tendances actuelles.

Un thème s'expose : c'est l'air connu de tous, « Ne parle pas, Rose, je t'en supplie », qui incarne le mari affolé par le bavardage de sa femme. Suivent une série de rythmes courts dont l'explication nous est fournie par le texte littéraire écrit il même la partition au-dessus du texte musical : ce sont les sornettes que débile la bavarde : « La concierge s'est cassée une côte ... », « Je voudrais un chapeau en acajou massif... », etc., etc. Nouvelles supplications du mari sur le thème de Rose, nouveaux bavardages. Enfin, le thème de Rose revient encore, mais défiguré et assombri, et le texte nous apprend que le pauvre homme est mort excédé.

L'on se rendra compte, par cette analyse, du rôle très restreint de l'élément musical. L'auteur n'a pas même pris le mal de chercher un thème personnel, la popularité de l'air de Rose suffisant à symboliser pour tous, le personnage de son petit drame. La qualité musicale n'y a plus aucun intérêt, et c'est juste ce qui nous intéresse dans cette œuvre (malgré que nous la considérions plus comme une plaisanterie, que comme une tentative sérieuse).

Il s'agit seulement qu'une compréhension s'établisse entre l'œuvre et le public par l'intermédiaire d'un symbole musical quelconque.

C'est l'innovation d'une musique représentative, d'une musique à motifs et à légende. Nous nous étonnons que l'on n'ait pas encore cherché à élargir à des œuvres plus importantes, à des œuvres d'orchestre, le genre en question. La raison en est, sans doute, la difficulté pour un public de concert symphonique, chacun ne pouvant avoir une partition, de suivre la partie littéraire explicative de la musique. Il suffirait, pour remédier à cet inconvénient qui rend impossible la réalisation au concert d'œuvres de cette sorte, d'installer dans la salle un écran de cinématographe sur lequel apparaîtrait simultanément avec la musique le texte littéraire, et qui pourrait ainsi être suivi de toutes les places. Peut-être, serait-ce le point de départ d'une forme d'art tout à fait neuve, qui n’aurait plus grand point de ressemblance avec ce que nous avons appelé jusqu'à ce jour, musique et composition musicale. Mais serait une sorte de symbolisme sonore. Même poussant à l'extrême toutes les possibilités, on peut émettre l'hypothèse d'un art musical de plus en plus représentatif.

Grâce à des bruiteurs mécaniques et perfectionnés, une reconstitution objective de la vie sonore deviendrait possible. Nous découvririons la forme des sons en dehors de la convention musicale, et ceci est, après tout, aussi vraisemblable, que de voir la peinture abandonner la représentation objective, pour s'échapper dans le domaine de la spéculation pure.

Gabrielle Buffet, Les Soirées de Paris, n° 22, mars 1914, pp. 181-183.

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PREFACE

Les quelques artistes dont on trouvera les travaux groupés ici, exposèrent l'an dernier dans une galerie où l'espace restreint nuisait à leurs œuvres. Aujourd'hui, présentées dans un cadre plus favorable, suffisamment isolées, elles prennent séparément, ou dans leur ensemble, toute leur signification.

Quelle que soit l'impression que vous laissera cette visite, il vous sera difficile de ne pas louer l'effort tenace de jeunes artistes, poursuivant la voie qu'ils se sont tracée sans souci des obstacles, sans se préoccuper des objections ou des ricanements d'un certain public. Ils n'ont pas de tendances communes, ni, d'entre eux, d'affinités profondes, mais une unique pensée les dirige : dégager l'art de sa tradition, de ses liens surannés, le libérer, en un mot car c'est le libérer que l'asservir étroitement à la personnalité de l'artiste.

Arrêtez-vous devant ces toiles aux couleurs vives, regardez ces bustes aux formes hardies, et tâchez à découvrir une influence. Echappant à toute contrainte, refusant toute direction, les exposants ne doivent rien qu'à eux-mêmes. C'est de leur sensibilité qu'ils reçoivent l'enseignement et l'inspiration.

Ce ne sont point des divergences d'école que vous trouverez ici. Vous ne constaterez que des écarts de sensibilité. Et il faut admettre avec nos artistes qu'à la sensibilité vient se joindre un élément nouveau : l'imagination qui permet toutes les variétés, autorise toutes les forces d'art, favorise les combinaisons les plus audacieuses, leurs heurts les plus inattendus, crée une harmonie presque toujours faite de contrastes.

Cette collaboration permet de dépasser les limites de l'impressionnisme. La formule de Monet n'est plus suffisante. Le peintre ne se soucie plus d'un moment ou d'une couleur; son cerveau peut lui offrir d'innombrables visions de nuances et de formes. La nature n'est plus que l'élément suggestif de son art.

Parmi ces novateurs, quelques-uns furent séduits par une même technique, ce n'est point ici l'endroit de la discuter. Cette discipline n'est pas d'ailleurs l'élément qui nous requiert le plus; ce n'est pas en elle qu'il faut voir le principal attrait d'un art qui vaut surtout par l'affirmation de la personnalité.

Cette conception est encore neuve et les tentatives de nos artistes, bien qu'elles marquent un progrès constant, trouvent encore le public réfractaire et parfois hostile. S'ils n'ont pas le bonheur de convaincre ou ne recueillent pas directement le fruit de leur initiative, du moins, auront-ils le mérite d'avoir montré la route et c'est à eux que pourra revenir l'honneur d'une rénovation.

RENÉ BLUM. Préface au catalogue du Salon de la Section d'or à Paris (10-30 octobre 1912), Galerie la Boétie.

05 septembre 2010

L'épistolier enamouré

Si la correspondance de Francis Picabia est aujourd’hui dispersée et parfois difficile d’accès (les lettres conservées à la Bibliothèque Jacques Doucet ne peuvent être consultées qu’avec l’autorisation de divers ayants droit), pour ne pas dire inaccessible quand les lettres en question appartiennent à des collections privées (1), il reste néanmoins possible de consulter ses Lettres à Léonce Rosenberg 1929-1940

ainsi que les

Lettres à Christine (Boumeester). Plus tardives, ces dernières ont été écrites entre 1945 et 1951 et sont suivies, dans l’édition de Jean Sireuil aux Editions Gérard Levovici, par un recueil de textes forts méconnus de Picabia, intitulé Ennazus. Ennazus, anagramme de Suzanne (Romain), à qui Picabia adressa de nombreuses lettres d’amour et que Les Presses du Réel annoncent comme une de leur prochaine publication :

Picabia avec Nietzsche, Lettres d’amour à Suzanne Romain (1944-1948). L’édition de cet imposant volume de 432 pages est le fruit du travail de Carole Boulbès, auteur notamment de Picabia, le saint masqué (Jean-Michel Place, 1998).

Il ne fait aucun doute que ce volume occupera une partie de mon automne.

Picabia était-il un imitateur obsessionnel de Nietzsche ? Quels rapports entretenait-il avec le romantisme allemand ? Peut-on comparer Picabia à Nietzsche et Suzanne Romain à Lou Von Salome ? Picabia, qui pratique le « collage philosophique » depuis 1917, adresse à partir de 1944 des lettres d'amour à Suzanne Romain en détournant les poèmes et aphorismes de Nietzsche. Rassemblant une sélection de quarante-huit lettres inédites reproduites en fac-similé, mais aussi des dessins, des peintures, des photographies et divers documents, cet ouvrage met en lumière les rapports de l'artiste au philosophe au travers d'une recherche historique approfondie, partant d'une correspondance amoureuse pour développer un questionnement philosophique et esthétique sur l'art, en passant par Goethe, Schlegel, Hegel, Baudelaire. [Les Presses du Réel].

(1) Telles ces 36 lettres autographes adressées à Jean Van Heeckeren entre le 24 janvier 1949 et le 10 octobre 1951, vendues 52800,- € en décembre 2006 lors d’une vente parisienne organisée par Christie’s, la notice du catalogue précisant « 76 pages manuscrites dont 50 avec dessins originaux, la plupart à pleine page (…) » La rencontre de Picabia avec Jean Van Heeckeren remonte au début des années 20 et sera, on peut l’imaginer, importante pour les deux hommes. Jean Van Heeckeren préfacera Chi-lo-sa (PAB, 1950) et est l’auteur d’un long essai inédit intitulé « Picabia l’imprévisible ». Il a fait partie des quelques auteurs qui se sont rassemblés après la mort de Picabia pour lui témoigner leur attachement dans In memoriam, une plaquette d’hommage publiée « sous le signe d’Orbes » (20 avril 1955) et entièrement consacrée à l’auteur de L’Athlète des pompes funèbres.

31 juillet 2010

« J’ai aimé ma vie »

Même en passant des dizaines d’heures à la BNF, je ne suis pas certain de trouver beaucoup d’informations biographiques sur

Hélène Jourdan-Morhange, que Cocteau décrivit ainsi : « la joue contre la belle courbe rouge de son violon, avec le sourire de l’Ange de Reims ». (1) Cette musicienne a très probablement

"C'est difficile d'être peintre". H. Jourdan-Morhange

signé L’Œil cacodylate parce qu’elle faisait alors partie du cercle amical et musical de Gabrielle Buffet. [Dissipons ici tout malentendu : « Gabrielle Buffet » pour l’état civil et « Gabrièle Buffet » pour le monde des arts et lettres. La première graphie de « Gabrièle » apparaît sans doute le 9 octobre 1912 quand elle signe son article dans le « numéro spécial consacré à l’exposition de la “Section d’Or” »] (2) On retrouve bien entendu

« Gabrièle » sur L’Œil cacodylate en 1921.

Que dire ? Hélène Jourdan-Morhange a notamment écrit Ravel et nous. L'Homme, l'Ami, le Musicien, ouvrage publié par les éditions du Milieu du Monde en 1945 (Genève). À propos de ce volume que j’attends impatiemment, certains libraires d’anciens notent ceci : « Photographies et illustrations de L.-A. Moreau en noir et blanc hors-texte. » (3)

Et que dire d’autre, sinon citer ici, in extenso, Jeanine Warnod ?

« Montfort-l'Amaury compte parmi les dimanches à la campagne de mon adolescence. Dans une voiture bringuebalante, nous arrivons aux "Mesnul", chez la musicienne Hélène Jourdan-Morhange, le peintre Luc Albert Moreau et leurs trois chats. Hélène, cousine de ma mère, altiste virtuose, avait créé les quatuors féminins dans les orchestres de chambre et recevait des ovations à chacun de ses concerts lorsqu'un drame bouleversa sa vie. Une paralysie du bras avec lequel elle tenait l'archet l'empêcha de poursuivre sa carrière. Aucun diagnostic n'en révéla la cause. On parla de névrite, d'un cas typique d'hystérie de conversion. Pendant des années, elle espéra, à force de traitements, améliorer son état. Ses déboires amoureux pouvaient-ils expliquer sa paralysie ? Un psychanalyste l'aurait-il guérie ? L'interprète de Ravel connut son premier chagrin d'amour avec son fiancé Pierre Lecomte du Nouy. Elle l'adorait mais la mère du prétendant, auteur d'Amitié amoureuse et autres livres à caractère sentimental, ne consentit pas à se séparer de son fils. La violoniste, cruellement blessée, se consola dans les bras d'un jeune peintre, Jacques Jourdan, ami d'enfance et de vacances à Saint-Lunaire, où ma mère et ses cousines retrouvaient, chaque été, les personnalités de la scène parisienne : Georges Feydeau, Tristan Bernard, le poète Jean Richepin et Ève Lavallière, vedette du Théâtre des Variétés avant d'entrer au couvent. Jacques Jourdan épousa Hélène mais disparut peu après, en 1916, au fort de Douaumont. Ce nouveau choc terrassa la virtuose et la priva de toute possibilité de jouer du violon. Mais celle qui fut l'une des premières femmes à nager dans l'océan, à bronzer sur la plage et à conduire une voiture ne se laissa pas abattre. Admirable pour la ferveur et l'audace qu'elle mettait dans tout ce qu'elle entreprenait, elle remplaça l'archet par la plume et proposa à plusieurs journaux des critiques musicales. C'était touchant de voir sa modestie se transformer en admiration pour elle-même. Elle s'étonnait de son talent. " Comment ai-je pu écrire un si bon texte? " disait-elle en se relisant. "Aux Mesnuls", Luc-Albert Moreau, avec une tonsure de moine et des petits yeux de biche, armé de cannes depuis sa blessure de guerre, nous entraîne dans son atelier et nous montre ses toiles peintes dans le Midi. Je suis en train d'admirer un vieux portrait de Grock, clown au regard tendre que j'avais vu au cirque Médrano tomber de son tabouret de piano, lorsque ma cousine nous appelle pour déjeuner. Dans un décor Louis Philippe envahi d'objets romantiques (bouquets de fleurs d'oranger sous globe comme ceux que peint ma mère, boucles de cheveux d'une arrière grand-mère de Luc conservés sous verre dans un cadre ovale), elle nous sert les produits de son jardin. Le dessert avalé, nous partons chez Colette, dans une forêt voisine. En tenue campagnarde, le visage caché par sa grosse tignasse frisée, l'écrivain jardine et nourrit les oiseaux qui la réveille chaque matin. De sa voix charmeuse de Bourguignonne, roulant les r, la Claudine vieillie m'apprend le nom de chaque arbre, ses amis. Elle vient de commencer un ouvrage sur sa mère, Sido, mais il est défendu de parler des livres qu'elle est en train d'écrire. Hélène m'a raconté l'amitié particulière qui 1a liait à Colette. Elles s'étaient rencontrées en 1925 lors de la présentation de L'Enfant et les Sortilèges, composé par Ravel d'après un poème féerique de l'auteur de Chéri. Séduite, la romancière l'a dépeinte: "Une chevelure bouclée par Melozzo da Forli pour son Ange à la viole d'ou émerge un visage de chat..." De son côté, Hélène confie : « Je voulais lui ressembler, me coiffer comme elle, élever de nombreux chats. » Inconsolable à la mort de "La Chatte", son double en animal, et de son chien "Souci", Colette se rapprocha plus encore de sa "Moune", comme la surnommait Ravel. Ravel, le dieu d'Hélène, aurait songé à l'épouser. Elle le connaissait depuis 1920, interprétait ses œuvres, écrivit des livres sur sa vie, sa méthode, son style, et publia un ouvrage de souvenirs vécus auprès du maître, Ravel et Nous, préfacé par Colette. Un jour, nous passons devant la demeure du compositeur, les volets sont fermés, il est absent. Je ne vois que l'extérieur de la maison. Hélène l'a décrite : « vraiment cocasse, coupée en quart de brie sur la route, avec son petit belvédère de boîte à joujoux ! Les pièces y sont peu spacieuses et la chambre du maître donnant à même le jardin semble une sorte de cave étonnée d'être habillée de satin. [ ... ] Il y avait aussi le rite de la visite au jardin révélant à l'invité surpris les termes d'enthousiasme que Ravel réservait aux choses de la nature. Extasié comme au premier jour, il semblait toujours découvrir les milliers de petites fleurs bleues composant sa pelouse japonaise, et ses arbres nains ... » Féministe et gauchiste, critique aux Lettres françaises, Moune, épuisée par trop de travail, décida enfin d'aller à Honfleur chez sa sœur Alice pour se reposer. Prise de malaise à son arrivée, ne ménageant pas ses forces, elle retourna à Paris dans sa voiture au lieu de rentrer en ambulance. L'infarctus ne l'épargne pas. Je lui dis adieu à la clinique : “ J'ai aimé ma vie ! ” murmura-t-elle dans un dernier souffle. » (4)

Mais ce serait plus qu’injuste d’oublier le monumental travail d’Ornella Volta, que je n’ai pas osé aborder il y a presque un an le soir où Aube Breton et Jackie Matisse invitaient en avant-première quelques happy few à la projection du film de Fabrice Maze, le premier consacré à la vie de Marcel Duchamp et désormais disponible en DVD chez Sevendoc - Collection Phares :

Marcel Duchamp, Iconoclaste et inoxydable, Fabrice Maze

car c’est dans :

Erik Satie, Correspondance presque complète, réunie et présentée par Ornella Volta, Fayard / Imec, 2000, p. 283, qu’on trouve le fac-similé d’une lettre écrite par Satie à Hélène Jourdan-Morhange le 23 mars 1917 :

Ne pas mentionner ce livre serait, vraiment, pure hérésie !

(1) Je fournirai bientôt la source de cette phrase de Cocteau.

(2) La bibliothèque Kandinsky étant fermée jusqu’à la rentrée, je ne suis pas en mesure de proposer l’article de Gabrièle Buffet ici évoqué.

(3) « Guite » est ici, à n’en pas douter, Marguerite Moreno, intime amie de Colette et qui prit part activement à la publication du texte d’Hélène Jourdan-Morhange alors que cette dernière tentait de publier son texte dans la France occupée.

(4) Jeanine Warnod, L'Ecole de Paris, Le Musée du Montparnasse / Arcadia éditions, Paris, 2004, pp. 113-114.

27 juillet 2010

French flappers of the jazz age

PIERRE DE MASSOT « LIVRES » PARIS- JOURNAL

18 NOVEMBRE 1923

« Carnaval n'est pas une théorie de pages lyrico-sensuelles non plus qu'un prétexte à faux décors. Il y a deux âmes masquées, tendues jusqu'au pathétique, qui se démasquent, en une atmosphère douce et voilée, mystérieuse et frémissante. Tout est pénombre, demi-jour, allusions, fraîcheur... pas de poings sur la table ni de points sur les i. "Suggérer, évoquer, voilà le rêve", disait Mallarmé, ce grand prophète. Voici le style: " La première, la main à la nuque, elle lui prend les lèvres, elle le mord, puis abandonne sa bouche. Il y pénètre comme dans une rose humide et boit. " Voici le charme : " Germaine avait dit : “Je vais mettre une petite robe rose.” En réalité sa robe est noire." (1) Nouveau ton. Aucune vantardise ne gâte l'amoralisme qui est délicat, froid, pincé comme un veston d'Édouard de Max. Carnaval porte en lui les germes de notre génération : le scepticisme, l'éther, l'opium, le jazz, les cocktails y ont une place parfaitement justifiée. Il porte aussi la preuve par 9 d'un admirable talent que je suis fier de saluer au passage. Mireille Havet, petite sœur, j'évoque votre curieuse silhouette penchée sur un whisky, au Bœuf sur le toit, quand Wance [sic] (2)

jette toute son âme à des êtres qui ne sont pas dignes d'un tel sacrifice. Et je vous offre ainsi l'épigraphe de Ducasse : "Triste comme l'univers, belle comme le suicide." » (3)

C’est au stand de Claire Paulhan, en avril dernier, que j’ai acheté le nouveau volume du Journal de Mireille Havet qui couvre les années 1927 et 1928. C’est dans ce volume qu’on découvre la rencontre de Mireille Havet avec Robbie (4) qui fut la compagne de Pierre de Massot et que ce dernier « offrit » bien imprudemment à l’auteur de

Carnaval. [Je noterai ici, bientôt, un extrait de Mon corps, ce doux démon dans lequel de Massot évoque cet insensé cadeau qui l’empoisonna pour de longs mois]. Terrible volume que celui-ci, où l’on suit l’inexorable descente aux enfers de Mireille Havet qui en ces années désespérément folles mettait à profit la moindre rémission dans son mal que pouvaient lui apporter ses voyages hors de la capitale (Nice, Cannes, New York, Grasse …) pour tout aussitôt soumettre un corps, déjà dévasté, aux implacables effets combinés de l’héroïne, de l’opium et de la cocaïne. Le 15 décembre 1927, Mireille se trouve chez Georges Claretie,

fils de Jules Claretie [qui est Georges, qui est Jules, qui est Léo ?] (5), discret signataire de L’Œil cacodylate, elle affirme avoir « cherché Robbie », ce jour même où elle rencontre Jacques Rigaut et Georges Auric. On imagine Mireille Havet très lasse, marchant sans plus aucune assurance dans les rues de Paris et d’ailleurs. On imagine les vils flashs que lui procurèrent des excipients plus encore vils. On imagine Mireille Havet la tête orientée vers de trop lointaines étoiles. La langue de Mireille Havet est sans doute terrible et désespérante, mais elle est belle.

(1) Il faut rendre justice à René Crevel qui fut sans doute le premier à avoir souligné la figure de style employée par Mireille Havet – et dont de Massot « se souvint » près d’un mois plus tard. C’est René Crevel qui, en effet, débute son article consacré au Carnaval de Mireille Havet en soulignant cette figure. [René Crevel in Les Nouvelles Littéraires, 6 octobre 1923].

(2) [sic] De Massot évoque ici, très probablement, le saxophoniste (et banjoïste à ses heures) Vance Lowry, auquel Michel Leiris n’hésitera pas à vendre les cadeaux qu’on lui offrit à l’occasion de sa première communion afin de pouvoir fréquenter les bars branchés de son époque. Leiris rappelle d’ailleurs dans Biffures que Vance Lowry fut « l’un des premiers musiciens nègres à être venus en France ».

(3) La phrase complète de Lautréamont est la suivante : « Tu dois être puissant, car tu as une figure plus qu’humaine, triste comme l’univers, belle comme le suicide... » Chant I, 13.

(4) « 4 heures du matin. Samedi 14 juillet 1928. Sale Garce. Ordure. Salope. C’est en t’injuriant immédiatement que je m’éveille, petite Robbie. Ordure de ma vie que j’aimais, qui m’aimait tant, soi-disant, quand nous nous endormions à cette heure-ci, vois-tu, à l’aube, et à regrets encore, on aurait dit de ta part aussi (sale comédienne aussi, sans doute), parce que jusque-là, nous nous aimions, renouvelant dans nos caresses les serments d’amour et les protestations et les chers projets pour les étés d’après et toujours ! ». [Mireille Havet, Journal 1927-1928, éditions Claire Paulhan, Paris, 2010, p. 225].

(5) Réponse sera donnée dans un prochain post.

21 juillet 2010

Signatures chez Hippocampe

C’est dans l’éditorial du numéro 3 (avril 2010) de la très belle revue Hippocampe (1) que Gwilherm Perthuis rappelle fort justement la première occurrence du terme cacodylate dans l’œuvre de Francis Picabia. C’était donc dans le poème intitulé

Cacodylate publié en 1918 et figurant dans le recueil intitulé Poèmes et dessins de la fille née sans mère paru à compte d’auteur aux Imprimeries Réunies (Lausanne). (2)

Entièrement consacré au thème de la signature (ceci explique cela),

Herwin Blumenfeld, Signatures (1919-1924) *

ce numéro de la revue Hippocampe propose un sommaire des plus alléchants. On y trouve notamment un texte inédit de Enrique Vila-Matas (3) intitulé « Voyager autour », un autre texte inédit de Bruce Bégout (4) intitulé « L’après-midi d’une terroriste », une étude de Fanny Schulmann consacrée au très injustement méconnu Dan Azoulay (artiste « psychogéographe » qu’on situe souvent rapidement dans la lignée du situationnisme et de Fluxus), un entretien avec Tzvetan Todorov, un texte de David Collin intitulé « Pour une généalogie des écrivains fantômes. Arthur Cravan - B. Traven - Roberto Bolaño »... bref, de quoi passer une partie de l’été en excellente compagnie.

(1) « Marquée dans sa composition par la question du montage (de Warburg à Bataille …), Hippocampe traite un thème au printemps et un pays à valeur insulaire (intellectuellement) à l’automne. »

(2) Titre disponible chez Allia et présent dans le recueil de l’ensemble des poèmes de Picabia publiés par la Mémoire du Livre (2002).

(3) Qui ne figure pas dans Vila-Matas, pile et face, rencontre avec André Gabastou, Argol, 2010.

(4) Qui ne figure pas dans le recueil intitulé Sphex paru chez l’Arbre Vengeur à peu près au même moment que Le Park (Allia).

* Reproduit in Erwin Blumenfeld, Dada Montages 1916-1933, Helen Adkins, Hatje Cantz, 2009, p. 59.

19 juillet 2010

Dark eyes for summertime

Jacques Rigaut (détail). Archives Jean-Luc Bitton

« Le seul vrai dandy du XXe siècle, c’est Jacques Rigaut. Son agence générale du suicide résume assez bien le comportement d’une Europe qui venait d’accepter cinq années de carnage industrialisé. Il porte des lunettes noires avant tout le monde, c’est-à-dire avant qu’elles ne deviennent à la mode, vers 1930 aux États-Unis. Une photo du début des années 20, où l’homme qui voyageait avec son suicide à la boutonnière semble à bord d’une voiture rapide, en apporte la preuve. »

Jérôme Leroy, Physiologie des lunettes noires, éditions Mille et Une Nuits, 2010, p. 85.

04 juillet 2010

Un été 1921

Dans les premiers jours de juillet, Jean Cocteau et Raymond Radiguet partent pour Besse-en-Chandesse, petit village d’Auvergne où les rejoignent Pierre Bertin, Marcelle Meyer et Georges Auric. La petite troupe se retrouve à l’Hôtel de Paris et s’amuse à composer autour de la vie d’Alfred de Musset. Alors que Radiguet endosse le rôle d’un laquais, Cocteau se prend pour de Musset, Pierre Bertin pour le frère de celui-ci, Marcelle Meyer pour sa maîtresse et Georges Auric pour … George Sand. Ils s’essaient à parler en alexandrins en se remémorant des tirades de l’auteur de Lorenzaccio.

Raymond Radiguet et Georges Auric à Besse-en-Chandesse, juillet 1921. Copyright Musée Jean Cocteau.

A la suite d’un différend avec une vendeuse de tarte (surfacturée et immangeable – l’affaire ira jusqu’à la gendarmerie locale !), l’équipe décide de quitter le village, préférant la douceur estivale du bassin d’Arcachon à une Auvergne qu’ils n’apprécient pas trop. Début août 1921, à peu près au même moment que l’année précédente, Cocteau et Radiguet retournent donc au Piquey.

Le Grand Hôtel Chantecler du Piquey

Ils y séjournent jusqu’en septembre et reçoivent de nouvelles visites d’amis, dont celles de Jean et Valentine Hugo et de Georges Auric également. Le séjour de ce dernier ne dut pas s’éterniser car le 21, Cocteau lui adresse une carte postale ainsi légendée : « la côte prise de l’hôtel Chantecler, arrivée d’un courrier. Côte d’Argent. Piquey »

Sources du post : Chloe Radiguet et Julien Cendres : Raymond Radiguet. Un jeune homme sérieux dans les années folles, Mille et Une Nuits, 2003 ; Correspondance Georges Auric / Jean Cocteau publiée par Jean Caizergues, Centre d'étude du XXe siècle, Université Paul Valéry, Montpellier, 1999.

27 juin 2010

René Blum (1878 - 1942)

La vie de René Blum demeure aujourd’hui encore des plus méconnues. Son nom apparaît peu (et parfois n’apparaît pas) dans les biographies consacrées à Léon Blum. La toile ne lui rend pas justice, d’autant que bon nombre d’indications le concernant sont erronées. Ce n’est que huit ans après sa mort qu’un ensemble de témoignages sera publié, sous la forme d’un numéro spécial tiré à 1200 exemplaires, par la revue Arts et Métiers Graphiques. En compilant rapidement mon dossier René Blum, j’ai extrait quelques dates et quelques photographies de l’homme dont le nom demeure à jamais attaché à celui des Ballets Russes de Monte-Carlo, « cet être unique qui fut aimé de tous ceux qui l’ont approché et adoré de tous les siens ». (1)

Naissance à Paris le 13 mars 1878, de René-Moïse Blum, dans le deuxième arrondissement de Paris, six ans après son frère Léon.

1912 : René Blum écrit la préface du catalogue du Salon de la Section d'or à Paris (10-30 octobre 1912)

qui se tient à la Galerie la Boétie. Le catalogue mentionne trois conférences dont une prévue pour le vendredi 25 octobre « par M. BLUM (Léon) René ». (Le prénom Léon est mentionné et biffé dans la transcription sur laquelle je m’appuie). (2) Mentionnons que parmi les peintres exposés et figurant au catalogue, six sont des signataires de L’Œil cacodylate : Marcel Duchamp, Jean Metzinger, Francis Picabia, Georges Ribemont-Dessaignes, Dunoyer de Segonzac et Henry Valensi. Le nom de René Blum figure également (après celui de Gabrièle Buffet) dans la liste des collaborateurs du numéro spécial du 9 octobre 1912 consacré à l’exposition.

1913 : Fin février, Marcel Proust lui écrit pour lui faire part de sa volonté de publier à compte d’auteur chez Grasset. Blum fera l’intermédiaire auprès de l’éditeur et Du côté de chez Swann paraîtra en novembre de la même année. [«Mais, mon cher ami, je suis très malade, j’ai besoin de certitude et de repos. Si M. Grasset édite le livre à ses frais, il va le lire, me fera attendre, me proposera des changements, de faire des petits volumes, etc. Et aura raison au point de vue du succès. Mais je recherche plutôt la claire présentation de mon œuvre. Ce que je veux c’est que dans huit jours vous puissiez me dire, c’est une affaire conclue, votre livre paraîtra à telle date. Et cela n’est possible qu’en payant l’édition.»]

1923 : De Bagnères-de-Luchon, le 8 août, René Blum écrit une lettre à Francis Picabia (fonds Doucet).

1924-1925 : il assure la direction de la Saison de Comédie et d’Opérette au théâtre de Monte-Carlo. [Source : numéro spécial de la revue Arts et Métiers Graphiques consacrée à René Blum, nov. 1950].

Cette direction durera jusqu’en 1932. [Source : fonds René Blum du Département des arts du spectacle, Bibliothèque nationale de France].

1926 : La Société des Grands Etablissements du Touquet lui propose d’assurer la direction artistique des Casinos. Un court papier paru dans une récente gazette locale nous dit que René Blum occupera cette place six années durant.

1932 : les Ballets Russes, fondés en 1909 par Serge de Diaghilev, renaissent sous le nom des Ballets Russes de Monte-Carlo (fusion des Ballets de l’Opéra de Monte-Carlo et du Ballet de l’Opéra Russe de Paris).

La troupe est dirigée par le Colonel de Basil (de son vrai nom Wassily Grigorievich Woskresensky) et René Blum (direction artistique).Publication de la pièce Les Amours du Poète écrite en collaboration avec Georges Delaquys, La Petite Illustration ‎(théâtre), n° 292 du 27 février.

René Blum circa 1930

1934 : les Ballets Russes de Monte-Carlo sont au bord de la faillite, nous dit un article in english. Sol Hurok, impresario américain, sauvera pour un temps la formation en la programmant au Saint-James Theatre ainsi qu’au Metropolitan Opera House

sous le nom de Ballet Russe de Monte-Carlo. Cependant, une photographie issue du fonds de la National Library of Australia nous montre un colonel et l’impresario Sol Hurok accompagnés de la troupe en 1933…

Ballets Russes de Monte-Carlo. Représentation de Don Juan. 1936

1936 : le colonel de Basil et René Blum cessent leur collaboration.

René Blum circa 1930

René Blum, New York, mars 1940

1940 : René Blum arrive à New York le 4 mars à bord du S.S. Washington.

1941 : 12 décembre. L’officier allemand Otto von Stülpnagel ordonne la rafle dite « des notables ». René Blum est arrêté à son domicile parisien (55, avenue Bugeaud, 16ème arrondissement) et sera interné dans plusieurs camps français. Il part de celui de Drancy (convoi n° 36) le 23 septembre 1942 pour le camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau. Il y est assassiné par les allemands le 28 septembre 1942. [Source : Journal Officiel de la République Française, 02/10/1987, p. 11519].

(1) Lettre de J. Lancrey-Javal (nièce de René Blum), à la danseuse Rosella Hightower, vers 1955 (coll. F. Lefaix).

(2) Voir catalogue de l’exposition La section d’or 1912-1920-1925. Le cubisme écartelé, dir. Cécile Debray et Françoise Lucbert, Musées de Châteauroux et Musée Fabre, Montpellier / Editions Cercle d’Art, 2000, p. 278 sqq.

28 avril 2010

Philippe Dada

Sur l’auteur de L’invitation au suicide (1922), on disposait jusqu’à présent

du Philippe Soupault Qui êtes-vous ? de Bernard Morlino (La Manufacture, 1987) et de Philippe Soupault Voyageur magnétique de Serge Fauchereau (déjà évoqué ici). Voici que depuis peu est disponible le

Philippe Soupault de Béatrice Mousli (Flammarion, collection Grandes biographies) qui avait déjà fait paraître, en 2005, une biographie de Max Jacob chez le même éditeur. Au fil du temps, les protagonistes de Dada et du surréalisme se voient consacrer des études de plus en plus complètes, souvent étoffées d’inédits et presque aussi souvent bénéficiant d’un éclairage panoramique que seules de longues années de patience et de travail permettent.

À quand une biographie de Clément Pansaers, de Pierre de Massot ? A quand la réédition du Picabia de Maria Lluïsa Borràs paru en 1985 chez Albin Michel ?

20 avril 2010

I have enough of art of art of art of art of art of art of art of art.

THEATRE AND MUSIC-HALL

To Erik Satie

The theatre in France, to quote Alphonse Daudet on the monarchy, is "a great dead old thing." The music-hall is a great young thing which is dying. As a matter of habit and to amuse a friend from the provinces, visiting in Paris, we still go occasionally to the theatre: Opéra; Gaieté-Lyrique or Ba-ta-Clan. We hear "Padmavati" ; "Chout" ; or "T'en fais pas !" Alas, what boredom !

A romantic repertory; conventional gestures; nothing living, moving, happening, which makes one cry out. Today France should get the first prize for bad acting. One has only to see, after a performance of the Cid or of Horace, these gentlemen of the Comédie-Française, in smoking coats, stomachs sticking out, congratulating each other in the wings, to be aware of this agony and to understand at once why it is legitimate to be bored in an orchestra chair.

Novelty is a microbe which directors, managers, actors, electricians, stage directors, door keepers, prompters, pursue and destroy every time that it shows the tip of, an ear behind the curtain. I beg you, make way for the dust, the mummies, the glory of past centuries. How comfortable it is to talk among the dead and with what eloquence does Rameses II talk with M. Millerand !

Before the war, from 1912 until the end of August, 1914, there was a leap forward, and there were those who wished to drag the coach out of the mire. Whatever they did, I congratulate them. Leon Bakst revolutionized the usual conception of costumes and of stage decoration. Nijinsky's sensual interpretation of "l'Après-Midi d'un Faune" called forth a storm of cat calls. (See the ridiculous article by Gaston Calmette in Figaro.) Igor Strawinsky gave his "Sacre du Printemps." Erik Satie already passed for mad. In the realm of the dance, we were forgetting Isadora Duncan, that nullity, in our astonishment over the daring of Valentine de Saint-Point who created "la Metachorie." I do not mean by this that the Muse-Pourpre, as this descendant of Lamartme loved to call himself, invented an entirely new choregraphy but I cannot deny that we felt a real pleasure in his attempts and experiments.

Picabia, P. de Massot et son autruche, 391 n° 17, juin 1924

It was the famous epoch when Paris revelled in the ridiculous. Cardinal Amette, an archbishop, condemned the tango in the name of the church. As a reprisal Eve Lavalliere played in a travesty of this name. Gaby Deslys turned things topsy turvy. Henry Bataille undressed Yvonne de Bray in "Phalène." Madame Caillaux killed Monsieur Calmette. De Max played the "Salomé" of Oscar Wilde. Picasso created cubism. Sarah Bernhardt was not yet dead nor had she lost a leg.

Since my pen writes this name, I must say exactly what I think of this tragedienne whose death is deplored by all the world, whose every visit to America was received with incredible enthusiasm. Sarah, against every novelty, was up to her last hour the principal pivot of a delayed fashion. Actors and actresses had their eyes fixed upon her alone and as she, for eighty years, had sung her verse and wept her prose, so all the actors and actresses sang their verse and wept their prose. It can be said that a whole generation limped behind this cripple.

Is it not so, Blanche Dufrêne, you whom I loved and who were found hanged in your dressing-room ? Is it not so, Moreno ? Jean Vonnel ?

On the contrary, the only tragedian who owes nothing to anyone, who searches, feels, composes his text, knows neither fame nor success. ... I refer to Edouard de Max. It is true that the legend which surrounds him discredits him. I am his friend ; I know his home with its burning incense, his old servant, his sumptuous pyjamas, his silk shirts, his mocking spirit, his rings, his melancholy, his bracelets, the depth of his eyes. All this does not prevent me from repeating that he is the only actor, a hundred cubits above a Mounet-Sully or a Gémier.

The war came. It has even been called a great war. The theatre was forgotten and the artists cared for the wounded . . . I was among those who hoped that this period of Jansenism would purify the stage and would kill forever this romanticism which horrifies me and which personifies stupidity to me.

American films, sharp as steel, cold like the poles, beautiful as the tomb passed before our dazzled eyes. The gaze of William Hart pierced our hearts and we loved .the calm landscapes where the hoof of his horse raised clouds of dust. The inconceivable, the incomparable, the royal Charlie Chaplin appeared, gros plan net, his two feet turned out and it was inevitable that he was the comic bomb which would overturn the theatre and the music-hall.

Alas, my poor France, country born malicious ! You make a barricade against exoticism, and the great ships which return to port, loaded with opium and unknown fruits, are phantom boats which never land. All this is over and it is our players who influence America. It is time to be on guard and to cry out as did Louis Aragon five years ago, "Down with the clear French genius !"

Yes, the theatre is dead, in spite of the efforts of certain ones: de Max, Ventura, Berthe Bovy, Eve Francis, etc. And the music-hall is dying, the supreme hope ! It dies, still loaded with fruit, and already one of its most savoury fruits, the poor Fortuge, sleeps under the willows of Bagnolet. It dies because it is not watered but is put under glass. We have enough of revues where they talk of Poincare, of Sacha Guitry, of Maurice Rostand, etc. ; of revues where ugly nude or semi-nude courtesans pass in procession under the baton of the conductor ; revues where there is nothing, nothing, nothing.

Imagination dead. It is really too easy to do always the same thing and to satisfy the stupid bourgeoisie. The Casino of Paris is becoming a branch of the Comédie-Francaise; the Folies-Bergères, a branch of the Odéon. Who would dare to say to a counterfeit dancer like Harry Piker that he does not dance; to a counterfeit singer like Mayol that he does not sing; to a counterfeit player like Polaire what she does not act ? For neither Mistinguett, nor Parisys, nor Gaby Montbreuse, nor Cora Madon, nor Mérindol occupy the place to which they are entitled. They are known, of course, but for something quite different. We know that Spinnelly changes her pantaloons twelve times a day, that Parisys changes her gown eleven times a day at Deauville and that is all.

Alas !

The legs of Mistinguett, the breasts of Spinelly, the buttocks of Parisys, the little stomach of Pépée constitute with Marcel Duchamp's "Nude Descending the Staircase" the only "poetic" realm in which I can live.

I have enough of the theatre where art is made !

I have enough of the music-hall where art is made !

I have enough of the cinema where art is made !

I have enough of art of art of art of art of art of art of art of art.

For the others = merde.

PIERRE DE MASSOT

July, 1923.

The Little Review, Autumn & Winter 1923-1924. Vol. IX, n° 4, pp. 3-6.

07 avril 2010

Vient de paraître maintenant

"En voilà une qui aurait bien besoin qu'on lui relève les jupes et qu'on lui mette une grosse ... quelque part pour lui apprendre que l'art n'est pas une petite pose devant le miroir. Oh ! chochotte ! (ta gueule !). La peinture c'est marcher, courir, boire, manger, dormir et faire ses besoins. Vous aurez beau dire que je suis un dégeulasse, c'est tout ça."

Arthur Cravan, "L'Exposition des Indépendants", Maintenant, n° 4, mars-avril 1914, pp. 16-17.

F. Picabia, Portrait présumé d'Arthur Cravan (1917 ?),
aquarelle sur papier © coll. Geert-Jan Visser

28 mars 2010

Vient de paraître

Les études sur les textes de Clément Pansaers ne sont pas légion. Dans son étude sur Le théâtre dada et surréaliste, Henri Béhar consacrait quatre pages aux Saltimbanques de Clément Pansaers et soulignait rapidement un cousinage du côté de chez Jarry :
« La seule pièce connue de Pansaers s’inscrit, par le sous-titre, par la mise en pratique de la Pataphysique, dans la ligne de Jarry, mais avec quel sens de la destruction en plus ! Pansaers ne cache pas sa dette : « Le Père Ubu, Le Surmâle, le Dr Faustroll (…) résument avec une puissance extraordinaire toute notre vie d’hier, d’aujourd’hui et de demain. » [C. Pansaers, « La vie à Paris », in Ça ira !, n° 17, mars 1922.] (1)
Ce texte m’ayant longtemps fait défaut, je suis allé le recopier il y a quelques mois dans la très studieuse salle de la bibliothèque Kandinsky. Mais voici qu’un éditeur belge, Chemins & Ruines (Bruxelles), vient de faire paraître (fin 2009 semble-t-il) Les saltimbanques « avec une présentation et un aggiornemento par quelques agents dormants du Parti imaginaire ». Ces derniers, longtemps après H. Béhar, avancent ceci :
« Le texte introuvable que nous rééditons ici présente toutes les caractéristiques formelles d’une pièce de théâtre. Et pourtant, ceci n’est pas une pièce. Pour les sceptiques, une didascalie extravagante placée peu avant la fin, ou cet avertissement, glissé dans une simili réplique : “ Peu perspicace est celui qui pense aussitôt à la scène.” »
Les deux textes qui accompagnent cette réédition des Saltimbanques de Pansaers (« Devant l’impossibilité d’une pensée isolée » et « Ceci n’est pas une pièce, mais un processus d’exorcisme ») comportent respectivement 32 et 14 pages au détour desquelles les « agents dormants » – très perspicaces quand il s’agit de démontrer que les textes de Pansaers souffrent, aujourd’hui encore, de l’estampille « dada », réductrice s’il en est dans le cas de l’auteur des Saltimbanques qui se serait bien passé de ce déterminisme historique – font preuve d’une virulence des moins pertinentes et des plus inutiles à l’égard de Marc Dachy (sans nommément le citer d’ailleurs) :
« Dans l’unique édition de ce recueil, l’incompétent en charge de l’établissement du texte (2) n’a pas jugé utile de conserver ce signe qui apparaît aussi dans les en-tête de sa correspondance, ou dans la gravure sur bois qui ouvre Le Pan-Pan au Cul du Nu Nègre. Ce qui revient à noter qu’il n’existe actuellement aucune édition satisfaisante du recueil intitulé Je blennorrhagie. » [note 16, page 42].
et, plus loin :
« Mais pour l’unique réédition du Point d’orgue programmatique pour jeune ourang-outang, l’idiot civilisé chargé d’établir le texte (2) a jugé bon de rectifier l’orthographe barbare de son Dada en “ orang-outang ”. » [note 17, page 43].
Ces deux remarques sont particulièrement regrettables car Marc Dachy est la personne qui en France a permis au plus grand nombre de découvrir Clément Pansaers, notamment en établissant l’édition de Bar Nicanor et autres textes dada chez Gérard Lebovici (1986).
Par ailleurs, sous réserve de vérification des sources, changer « ourang-outang » en « orang-outang » ne nuit aucunement à l’approche ni à la compréhension du texte en question. Le français de Pansaers était parfois hésitant, parfois fautif, même, à en examiner de près, par exemple, son « Novénaire de l’attente » et il n’est pas anormal, dans ce cas précis, de rétablir l’orthographe indiquée.
Quant au « signe »
C. Pansaers, gravure sur bois illustrant Le Pan-Pan au Cul du Nu Nègre (1920) - détail
C. Pansaers, en-tête d'une lettre adressée à Tristan Tzara (18.12.1920)
évoqué par les « agents dormants », la notation musicale de reprise da capo, qu’aurait omis de reporter Marc Dachy dans son édition, il faudra bien qu’on nous le décrive plus précisément. En ce qui me concerne, je ne lis que le monogramme « CP » ou « PC » qu’utilisait Pansaers tout simplement pour … signer – et non « DC » pour da capo, ce qui me paraît être une surlecture d’autant plus fautive qu’elle est doublée d’un « incompétent en charge de l’établissement du texte ».
Enfin, juste une petite remarque en passant aux « agents dormants », ici un peu endormis : il n’existe pas de « Pistons d’air » chez Duchamp (leur remarque, page 15), mais des « Pistons de courant d’air » (eh oui, ça change tout !). Quant à « l’actrice Isadora Duncan » (leur remarque, page 23), il me semble utile de préciser qu’elle était plutôt … danseuse. Il est vrai qu’une petite erreur est bien vite arrivée.
Pour l’heure, il reste encore quelques textes de Pansaers à republier. Ceux publiés sous le pseudonyme de Julius Krekel en 1910 ne semblent pas encore avoir suscité la curiosité d’un traducteur. "Arlequinade", "Brève incursion dans le Blockhaus de l’artiste", "Méditations de carême" et le très beau "Novénaire de l’Attente" demeurent quasiment inconnus et très difficiles d’accès pour ceux qui en ont entendu parler. Pour pallier ce vide éditorial (qui ne concerne qu’une poignée de lecteurs, mais, qui sait ?…), j’ai il y a peu envoyé le "Novénaire de l’attente" à quelques personnes de mon entourage.
Pour une approche de Clément Pansaers, on se reportera utilement, comme disent les études sérieuses, à l’article de Georges-Henri DumontRésurrection (1917-18), une revue wallonne d’avant-garde sous la première occupation allemande ») et, bien sûr, à l’article de Marc Dachy « Résurrection de Clément Pansaers » (3).
Le prochain post sera sans doute consacré au reprint du Picabia par Marie de la Hire, désormais disponible grâce à Kessinger Publishing.
Je prendrai également le temps de mettre en ligne Les Saltimbanques de Pansaers et de parler, quand je l'aurai lu, du prochain livre de Marc Dachy (que je n'ai jamais rencontré mais qui m'a immédiatement répondu par courrier quand je lui ai posé une question sur Pansaers il y a déjà quelques années), intitulé Exposer Dada (Transédition).
(1) Étude sur le théâtre Dada et surréaliste, Gallimard, coll. Les Essais, 1967. Rééd. coll. Idées, nouvelle édition revue et augmentée, 1979.
(2) Je souligne.
(3) Introduction au reprint des numéros de Résurrection, éditions Jacques Antoine, Bruxelles, 1973.
@ @ @
Perdre des théories (Enrique Vila-Matas),
c’est bien ce qu’il me fallait afin de pouvoir me replonger dans des textes où il ne serait plus question de Dada, de Picabia et de références d’articles qui à la longue m’empêchaient littéralement l’accès à toute littérature. A la suite de Journal volubile et Docteur Pasavento, je viens de refermer Dublinesca.
Après trois volumes enchaînés les uns après les autres, l’impression d’avoir lu un même texte me confirme que Vila-Matas est un authentique auteur (Le mal de Montano demeure sans doute son meilleur texte), comme Pierre Senges, dont vient de paraître
Etudes de silhouettes, mince volume si on le compare à son Lichtenberg, mais assurément du plus grand intérêt.
Dans L’homme qui tua Roland Barthes,
Thomas Clerc (on lui doit Maurice Sachs le désœuvré et l’édition des cours de Barthes consacrés au Neutre), on trouve un long portrait d’Edouard Levé, auteur de Suicide récemment paru en Folio.
C’est au moment où je repensais régulièrement
à la Défaite de Pierre Minet que les éditions Allia le font à nouveau paraître (leur première édition remonte à 1994). Une petite déception toutefois : si la notice de ce volume annonce « une édition augmentée de témoignages de Jean Paulhan, Léon-Pierre Quint et Antonin Artaud », le lecteur perspicace ne les trouvera malheureusement pas.
« (…) ce temps faux où l’on couvrait tout de strass et de nylon, de shit et de coke, de cancer et de sida, glasnost et aérobic », peut-on lire
dans Tarzan Boy, sous-titré Une chanson-drame et constituant, avec M’man et Miss Electricity, l’ensemble intitulé Modane de Fabrice Melquiot où l’évocation des années 80, qui certes ne constitue pas tout le propos, est très juste et très touchante, notamment les deux listes de noms et de prénoms de camarades de classe.
S’agissant d’une traduction de l’allemand, j’en déduis que la langue de départ doit être très belle – et la traduction de qualité :
Dames & Messieurs sous les mers
de Christoph Ransmayr révèle à coup sûr un auteur.
Enfin, c’est en allant rejoindre Jacques Floret au salon Chic dessin (60, rue de Richelieu, 75001 - jusqu'au 29 mars), à son invitation et parce qu’il y expose les dessins de son dernier livre intitulé
Dessin issu de Oh ! le bel été © J. Floret / Derrière la salle de bains éd.
Oh ! le bel été (Editions Derrière la salle de bains) que ce dernier m’a offert Les Solennels (textes de Jacques Vaché et Jean Sarment) paru chez Dilecta, éditeur dont l’éclectisme nous propose depuis peu la revue Proverbe en fac-similé mais également
Rachel & Rosco de Jacques Floret qui propose près de 80 dessins représentant chacun une femme accompagnée de son chien et réalisés à l'aide d'un stylo bille quatre couleurs.
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