15 juin 2005

A maman et à papa, tendrement, Pierre de Massot, 1926 [1]

Pierre de Massot par Berenice Abbott ©

Pierre de Massot naît à Lyon le 10 avril 1900. Il est le sixième enfant du comte et de la comtesse de Massot de Lafond. En dépit de ses origines aristocratiques, la famille de Massot est sans fortune. Quand son père prend sa retraite (il est alors économe à l’Hôtel-Dieu de Lyon), la famille s’installe dans une petite ville du Rhône, Pontcharra-sur-Turdine. Faisant preuve d’excellentes dispositions littéraires, Pierre de Massot passe avec succès ses deux baccalauréats. Dès novembre 1919, De Massot part pour la capitale mais des soucis financiers l’obligent à retourner vivre chez ses parents pour quelque temps. Afin de se tenir au courant d’une actualité concentrée à Paris, il s’abonne à Comœdia, « le magazine des spectacles et des arts » dans lequel, par le biais d’un compte rendu de la dixième livraison de la revue 391 créée par Francis Picabia, il découvre le mouvement Dada. Il s’y abonne également et fait part à Picabia de son enthousiasme : « Alors que le clan réactionnaire et philistin semble devoir, ces jours derniers, fixer au dadaïsme des limites (...), il se fait qu’il passionne étrangement un tout jeune écrivain provincial, je dirais presque campagnard. Oui, Monsieur, si naïve que paraisse ma déclaration, je suis des vôtres, étant un pèlerin de l’Absolu, ... à Rebours. » C’est ainsi que Picabia, ravi de cette lettre, devient son protecteur (il le nomme « gérant » de 391, l’héberge dès novembre 1921) et l’introduit dans les cercles parisiens de l’avant-garde. De Massot fréquente alors un grand nombre d’artistes et d’écrivains, parmi lesquels on compte André Gide, Jean Cocteau, Henry de Montherlant, Jacques Rigaut, Erik Satie. à présent en bonne place, Pierre de Massot peut enfin participer activement aux diverses activités dada. Encouragé notamment par Max Jacob à qui il voue une grande admiration (« Il n’était à mes yeux que l’incarnation du poète », écrira-t-il en 1948 dans Les Nouvelles Littéraires) il commence à publier ses premiers textes, sous forme d’articles et de manifestes.Observateur d’un monde qui jusque-là lui était étranger, il écrit, entre juillet et novembre 1921, De Mallarmé à 391. Premier ouvrage consacré aux avant-gardes, dédié à Francis Picabia (qui finança en partie l’entreprise) et à Marcel Duchamp, De Mallarmé à 391 est publié début 1922, mais passera inaperçu, les attentions de ses pairs étant focalisées sur le Congrès de Paris. Bien que ne comportant pas de mention de tirage, ce premier essai a sans doute connu le même sort que ceux qui le suivront, c’est-à-dire un tirage des plus confidentiels (sa plaquette intitulée Orestie ne sera publiée qu’à... 6 exemplaires). Ces faibles tirages ainsi que la place encore mineure accordée aujourd’hui à Pierre de Massot au sein de dada et du surréalisme, ont peu à peu relégué, fort injustement, cette œuvre au rang réducteur de rareté bibliophilique.

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