08 juin 2007

Le Bœuf, encore

Esquisse * quelque peu guindée et assurément vieille France d’une Troisième République, relatant menues anecdotes économico-politico-artistico-littéraires,



Quand le Bœuf montait sur le Toit ** dresse un portrait assez inégal d’une France qui a traversé 1870, 1914-1918 et le début des années trente. Les faits demeurent essentiellement centrés sur la capitale. En fin de volume, un index des noms cités permet une lecture transversale et quelques recoupements attendus.
Pages 184-185 de l’opus, j’apprends ceci : « Sans oublier, sur la Seine, la péniche-cabaret du Bœuf sur le Toit et les trois péniches-restaurants Amours, Délices et Orgues, aménagées par le couturier Paul Poiret et décorées de toiles imprimées d’après les dessins de Dufy . »
Si j’ai précédemment cité les péniches de Poiret, j’ignorais en revanche l’existence de celle de notre cabaret préféré. Des recherches à son sujet risquent de me demander quelque temps et de m’aventurer sur certains chemins de traverse. Une phrase cependant a retenu mon attention : « Le mouvement Dada sombrera assez vite dans une ennuyeuse outrance. Mais quarante ans plus tard, serons-nous tout à fait exorcisés des sortilèges de désespoir dont il fut le fugitif véhicule ? ». Par ailleurs, à l’occasion des trente ans de la collection l’Imaginaire, Gallimard propose notamment



Le piéton de Paris de Léon-Paul Fargue (photographié ici par © Brassaï circa 1932-1933) accompagné d’un CD sur lequel on peut écouter sa voix en 1951 ainsi que des entretiens (mai et juin 1947) de l’auteur de Haute solitude avec Adrienne Monnier. ***
Le cinquième chapitre du Piéton de Paris (pp. 47-53) s’intitule, ô surprise, Le Bœuf sur le Toit et s’achève, ô tempora ! ô mores ! , sur ces tristes lignes :
« Quant à ceux de la bande Boissy-d’Anglas, ils ont des enfants, des dettes, des postes. J’en rencontre parfois au coin d’une rue ou dans le salon de quelque vieille dame. C’est à peine si nous échangeons une poignée de souvenirs … »

Réunir une poignée de souvenirs, n’est-ce pas ce à quoi nous nous bornons jusqu’à présent ?

* Pour reprendre les propres termes de la note liminaire de l’auteur.
** Jacques Chastenet (de l’Académie Française), Paris, 1958, Librairie Arthème Fayard, coll. Les Quarante.
*** Et pour quelques euros de plus, dans la même collection, Le festin nu de Burroughs agrémenté du film de David Cronenberg, pour ceux qui ont la nostalgie de l’Interzone, des prophéties du mugwump et d’un Tanger stupéfiant.